Témoignage d’un papa – Courir pour Noah

Naissance

Le souffle coupé, le souffle inexistant et ce malgré l’amour.

Quelques jours après ta venue au monde j’apprends que tu as la trisomie 21.

J’ai l’impression que le médecin parle une autre langue. Impossible que ça nous arrive à nous. J’essaie de me dire que ce cauchemar est bientôt terminé. Que bientôt, ta maman te donnera la vie et que ce chromosome ne sera pas présent. J’ai tellement de peine, mais j’essaie de rester fort pour toi, pour mon amoureuse qui a le cœur en miettes.

Un an / JOUR 1

Marcher, musique dans mes oreilles pour essayer de canaliser mon énergie.

Ta première année de vie fut rocambolesque. Devenir parent est certainement le plus complexe et le plus merveilleux des voyages. Le jonglage des rendez-vous médicaux, du travail, des incertitudes sur ton état de santé me rentre dedans. J’essaie d’être fort, je te le jure mon petit homme, mais ce n’est pas toujours facile. Honnêtement, du haut de mes vingt six ans, je le trouve parfois pénible ce voyage.

Deux ans / JOUR 2

Commencer à courir quelques kilomètres de temps en temps, recommencer à respirer.

Essayer d’être un bon papa et par le fait même essayer aussi de devenir un spécialiste en tout; physiothérapie, ergothérapie et ce pour mieux t’épauler. La vie est chaotique, mais nous commençons à comprendre que ce petit humain est dans nos vies pour nous montrer un nouveau chemin. Un chemin plus boueux, rempli de roches et de collines, mais à la fois plus lumineux et vrai. Ce chemin me donne envie de commencer à y courir, des petites distances, 5-10 km. Un jour à la fois.

Trois ans / JOUR 3

Courir par désir. À force d’enfiler mes souliers de course, je vois mon angoisse se dissiper.

Je ressens de la clarté. Chaque questionnement devient moins lourd. Noah est heureux et nous sommes soulagés de constater qu’il progresse bien et qu’il n’a pas de problèmes de santé. Malgré les pneumonies des premières années, il voit et entend bien et depuis maintenant quelques mois il marche. Cela peut paraître banal mais lorsque marcher n’est pas une certitude, je vous garantie que cela est la plus grande des fêtes quand ça arrive. Le voir marcher un pas devant l’autre, me motive encore plus à me dépasser.

Quatre ans / JOUR 4

La passion de la course.

Courir est depuis maintenant quelques années essentiel à mon bonheur. Je me trouve humblement un talent et j’ai envie de créer avec ma copine #courirpournoah qui nous permettra de ramasser des sous pour les personnes ayant une déficience intellectuelle. Je fais plusieurs courses depuis quelques mois; Bromont Ultra, Harricana et CourirpourNoah. Cette dernière course me plonge dans de grands moments d’euphorie. La première année je cours pendant 21 heures consécutives et la deuxième année je fais 250 km en 5 jours en montagne. Je suis fier de moi, de nous, de ce que nous créons par amour pour notre fils.

Cinq ans / JOUR 5

Courir pour Noah, courir pour moi. Je crois fermement que sans mon petit trésor je n’aurais pas trouvé la force de me mettre à la course, moi qui était plutôt de nature sédentaire. Cinq années après sa naissance, la course est pour moi un mode de vie. Je suis un ultra trail runner et j’en suis fier. La vie peut parfois être absurde quand je pense qu’à sa naissance, je croyais qu’une partie de moi venait de s’éteindre et qu’aujourd’hui avec lui, ma vie est plus riche et colorée. Nos petites réussites grandioses nous poussent à évoluer ensemble. Merci Noah, grâce à toi j’ai découvert ma passion; la course en montagne.

Je t’aime

Papa

Pour consulter le témoignage dans sa publication originale: https://cieleathletics.com/fr/blog/2021/08/11/courir-pour-noah/

*Photo et texte par Marc-Antoine Forand