Portrait de Carl, 40 ans

Carl a 40 ans. Il a bénéficié du tout premier programme de stimulation précoce disponible pour les bébés nés avec une trisomie 21, issus de familles francophones. Il a été un pionnier de l’intégration scolaire primaire et secondaire dans sa commission scolaire et dans son quartier, favorisant son intégration communautaire via diverses activités parascolaires, camps d’été à titre de campeur et plus tard d’aide moniteur, etc.

Suite au secondaire, il a fréquenté pendant 5 ans Le Fil d’Ariane, développant les habiletés techniques pour accéder au titre d’«artisan brodeur». Ayant eu l’occasion de développer quelques expériences heureuses en cinéma et télévision, il a été admis aux Muses, centre des Arts de la scène qui lui ont permis de travailler ses forces et de réaliser de nouvelles expériences en cinéma, télévision et productions sur scène, particulièrement en danse. Il a continué à travailler occasionnellement sous la direction de Menka Nagrani pour Les Productions des Pieds des Mains avec qui il a été en Europe à deux reprises.

Après 5 ans de fréquentation des Muses et ses difficultés à découvrir l’inévitable compétition sans éprouver douloureusement un sentiment de rejet et une perte de confiance en lui, Carl était mûr pour élargir son champ d’expérience en fréquentant le CEGEP du Vieux Montréal où il a pu vivre une intégration partielle en arts plastiques (dessin, peinture) et accéder à un premier stage en milieu de restauration, à la cafeteria. Cette expérience lui a permis d’accéder à un stage individuel d’aide cuisinier au Resto Vego qu’il fréquente avec fierté depuis quelques années.

Il n’a jamais abandonné son intérêt pour les arts. Bien sûr, sans grand support du milieu artistique, les auditions se font plus rares et ses chances s’amenuisent. Il fréquente assidûment les «Lundis-théâtre» offert conjointement par le RT21 et Joe Jack et John. Depuis plus d’un an, il participe aux formations en danse intégrées offertes par Corpuscule Danse.

Si sa carrière artistique semble en dormance, il relève actuellement un nouveau défi. Quitter son milieu familial pour intégrer un appartement individuel au sein de l’obnl Utopie créatrice, ne se fait pas sans émotions contradictoires. Partagé entre la fierté d’assumer son autonomie et la nostalgie d’une «enfance protégée, mais révolue», après ses premiers pas dans sa nouvelle vie, la fierté semble l’emporter en dépit de la lucidité de Carl quant aux nombreux apprentissages requis pour réussir cette nouvelle étape de vie dont celui de la solitude partagée par ses voisins une fois fermée la porte de chaque logement.

Carl est fier aussi d’avoir comme sa sœur ainée et son frère cadet une adresse bien à lui.

Sa mère tient à le remercier d’avoir été son inspiration et son guide pendant de très nombreuses années, donnant place à l’Utopie créatrice!

Merci à la mère de Carl pour ce beau portrait.